Petit bilan de deux années de Sarkozysme

Publié le par Ballon Rouge

Le président Sarkozy a lancé 55 réformes en état de marche. Si elles ne sont pas achevées, parfois non appliquées, elles ont l'ambition de transformer de façon irréversible le paysage social et même la nature de la Vième République.

 

Il en résulte une surchauffe législative qui irrite jusqu'à ses propres élus alors même que les lois votées sont loin d'être mises en œuvre. En effet, d'après le bilan des lois publié par le Sénat en septembre 2008, 65 lois parues au JO depuis juin 2007 restent partiellement ou totalement inappliquées avec un taux d'application de 32,4 %.

L'activisme présidentiel est porté par une pratique de communication qui répond aux faits divers les plus marquants par une nouvelle proposition de loi (assassinat de deux infirmières psychiatriques, accident de manège, chiens dangereux, etc.)

 

Il n'empêche que le Parlement légifère et les ministres réagissent aux injonctions présidentielles à tour de bras dans tous les domaines avec une vision politique qui consiste à se rapprocher le plus vite possible du modèle anglo-saxon néolibéral. Pour simplifier, il s'agit de réduire la capacité d'intervention de l'État par une diminution des effectifs de fonctionnaires et une privatisation des services publics, d'organiser la précarité pour les travailleurs du privé et les chômeurs, d'imposer le principe d'assurance en opposition au principe de solidarité défini par la sécurité sociale et, afin de contenir la colère de la masse des perdants de cette politique, de mener une politique liberticide et de créer des boucs émissaires.

 

Pour se remémorer toutes ces dispositions , nous allons citer:

 

La Révision Générale des Politique Publiques.

Puis, les mesures aggravant la précarité des travailleurs, des chômeurs et des retraités.

Ensuite, les lois prises pour limiter les liberté individuelles et collectives.

Un chapitre sur lequel j'ai fait l'impasse : la politique de l'environnement.

Le soutien toujours plus important aux classes privilégiées.

La politique étrangère.

Enfin, les deux réformes constitutionnelles.

 

Pourtant, aussi bien dans l'éducation que dans la justice, la santé, pour la défense des services publics, ou encore, dans le privé, contre le chômage et les délocalisations, les luttes se multiplient et se radicalisent. En Guadeloupe et Martinique, elles se sont généralisées, offrant un modèle d'unité, de combattivité et de détermination.

 

 

 

1   La Révision Générale des politiques Publiques

 

La doctrine qui prévaut est la suivante : Une coupe claire dans les effectifs par le non remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite (35 000 suppressions par an), l'introduction de critères de rentabilité, un management calqué sur celui des entreprises privées et dépendant intimement du pouvoir politique.

 

            A-L'exemple de la santé :

 

Le Projet de Loi de Financement de la Sécurité Sociale permet au directeur de la Sécurité sociale de modifier de façon unilatérale le tarif des actes, d'engager le remboursement variable en fonction du Service Médical Rendu, de soumettre les hôpitaux à des objectifs de dépenses non liés aux besoins sociaux, etc.

La loi « Hôpital, Patients, Santé, Territoires » oblige une complémentarité du public, du privé à but non lucratif et du privé en concurrence libre et non faussée, contrats présentés par le directeur de l'Agence Régionale de Santé nommé en Conseil des ministres. Les hôpitaux devenus Établissements Publics Sanitaires seront dirigés, après suppression du Conseil d'administration, par un véritable « patron »

Les médecins hospitaliers seront rémunérés avec une partie variable allant jusqu'à 70% pendant que des centaines d'hôpitaux de proximité ferment et qu'il est programmé 20 000 suppressions d'emplois.

 

            B-Pour l'éducation :

 

Pour la loi Pécresse, le schéma est le même avec des Présidents d'université ayant les pleins pouvoirs de recrutement, d'orientation de la recherche et de l'enseignement, soumis à des critères de rentabilité dans le cadre d'une autonomie financière dépendant d'un bassin économique local et de l'équilibre des comptes.

Dans le premier et second degré les suppressions de postes entraînent une diminution de l'offre éducative. Deux heures de moins par semaine dans le premier degré, soit 7,7% ; la remise en cause de l'accueil des enfants de deux ans dans la perspective de transférer l'accueil en maternelle dans des maisons enfantines. Dans le second degré, le projet Darcos, repoussé en 2010 est de créer des options diverses camouflant la diminution des horaires de cours. Dans les lycées professionnels, le bac pro se fera en trois ans au lieu de quatre.

Moins d'enseignants égale moins d'éducation.

La suppression des RASED permet déjà de récupérer 1.500 postes cette année, et la suppression des IUFM combinée aux changements dans la formation permettraient d'économiser 10 000 postes budgétaires, dont 3.000 postes en moins au concours de recrutement. En tout ce sont 14 000 postes qui disparaissent dans l'éducation.

 

La politique de réduction des effectifs et de rentabilisation, au détriment des services rendus, se poursuit dans tous les ministères : regroupement des agents des Impôts et du Trésor avec baisse des effectifs, suppressions de centaines de tribunaux, fermetures d'ambassades et de consulats, réductions des maigres subventions aux activités culturelles soumises à des critères de rentabilité, etc.

Si cela ne fait pas vraiment de peine il y a aussi la diminution des effectifs policiers et militaires .

 

 

2   Des travailleurs toujours plus précaires

 

Indépendamment du fait que 75 % des embauches se font suivant des statuts précaires (intérimaires, CDD, temps partiels, stagiaires perpétuels), les nouvelles dispositions légales remettent en cause l'ensemble des acquis issus des luttes passées, restreignant les droits, imposant des contraintes plus importantes aux salariés, abaissant leur revenu.

 

A-La réforme du Code du travail :

 

Elle a commencé en 2004 sous l'impulsion de Gérard Larcher. Le Code du travail validé le 17 janvier 2008 par le Conseil constitutionnel, est entré en vigueur le 1er mai 2008.

Cette « recodification » a redécoupé tous les anciens articles, les a renumérotés, ce qui remet en cause la jurisprudence. Cinq cents lois ont été déclassées en décrets modifiables à l'avenir sans passer devant le Parlement. Il est dit que « le plan de la partie législative doit se penser dans la perspective de la partie réglementaire et des réformes à intégrer dans les prochaines années » dans l'objectif « d'accueillir de nouvelles dispositions en référence au droit communautaire. »

Il s'agit d'avoir moins de contrôle, moins de droit pénal du travail, moins de droit syndical. Le Code prévoit l'éclatement statutaire des salariés (envoi de catégories entières de salariés vers d'autres Codes : agriculteurs, assistants maternels, éducateurs, mineurs, salariés des transports, d'EDF et GDF, salariés de la Fonction publique, etc.).

Cet éclatement des statuts tend à rendre caduques les relations contractuelles salariales pour passer du contrat collectif au contrat de gré à gré.

En matière de santé, d'hygiène et de sécurité, le Code définissait ainsi des obligations, des contreparties au « lien de subordination juridique permanent à l'égard de l'employeur ». Le nouveau Code crée un chapitre « Obligations des salariés » symétrique du chapitre « Obligations des employeurs ».

 

B-La loi en faveur du Travail, de l'Emploi et du Pouvoir d'Achat (TEPA, 21-08-07) :

 

Cette loi instaure

- l'exonération de toute charge fiscale et sociale des heures supplémentaires ;

- un statut simplifié pour les entrepreneurs individuels ;

- un « contrat à durée déterminée pour la réalisation d'un projet » défini à titre expérimental. Il permettra à une entreprise d'embaucher pour une durée de 18 à 36 mois un ingénieur ou un cadre afin de réaliser un projet ;

- la suppression de l'autorisation administrative pour dépasser le contingent d'heures supplémentaires ;

- la priorité donnée à l'accord d'entreprise sur les autres niveaux de négociation pour l'organisation du temps de travail.

 

Il s'ajoute la proposition de loi de Richard Maillé visant à permettre aux salariés qui le souhaitent de travailler le dimanche.

 

            C-La loi de modernisation du travail (mars 2008) :

 

- allonge la durée de la période d'essai à l'embauche (pour un ouvrier : deux mois contre 15 jours ; pour une maîtrise : trois mois contre deux mois ; pour un cadre : quatre mois contre trois), renouvelable une fois ;

- crée la rupture par consentement des deux parties. Elle se fait sans motif (donc pas de recours aux prud'hommes une fois signée : si le salarié veut y aller, il doit en informer l'employeur au préalable et prendre le risque de subir des pressions). Le délai imposé à la direction du travail pour homologation est dérisoire et l'indemnité, dans ces conditions, sera de toutes façons minorée. Enfin, le solde de tout compte est libératoire au bout de six mois au lieu de cinq ans ;

- la loi légalise le portage salarial. Il s'agit d'une relation triangulaire entre une entreprise de portage, le salarié et des entreprises clientes. Le salarié prend le risque d'un entrepreneur en cherchant sa clientèle alors qu'il doit céder une partie de sa rémunération à la société de portage qui le salarie ;

- Remet en cause la dispense de recherche active d'emploi pour les chômeurs de plus de 55 ans ou 57,5 ans ;

- redéfinit l'offre raisonnable d'emploi déterminé par le Projet Personnalisé d'Accès à l'Emploi. C'est celle que le chômeur ne pourra refuser plus de deux fois sous peine de radiation. Tous les trois mois le PPAE sera réactualisé. Par exemple, au bout d'un an, la rémunération devrait être au moins à la hauteur du revenu de remplacement dans une zone située au plus à une heure de transports en commun ou encore à moins de 30 kilomètres du domicile.

 

Par contre le complément de salaire en cas de maladie est obtenu au bout d'un an au lieu de trois ; l'indemnité de licenciement est 1/5 de mois par année d'ancienneté au lieu de 1/10 exigible au bout d'une année de travail au lieu de deux ; le CNE est transformé en CDI.

 

            D-L'indemnisation du chômage :

 

Actuellement, 3 500 000 chômeurs sont inscrits au Pôle de l'Emploi, dont 2 500 000 de catégorie A et un million  à activité réduite.

La CFE-CGC et la CFDT ont signé le protocole. Il précise une baisse des cotisations patronales. La création de la filière unique (Pôle de l'Emploi réunissant ANPE et ASSEDIC) relève de trois principes : la durée d'affiliation ouvrant droit à l'indemnisation serait de cinq mois ; la durée d'indemnisation serait égale à 90 % de la durée d'affiliation alors qu'actuellement , pour certaines filières, elle est supérieure à la durée d'affiliation ; la durée maximale serait de 22 mois contre 23, sauf pour les plus de 50 ans pour qui la durée serait de 36 mois. Concernant le cumul indemnité et activité réduite, la durée serait de six mois contre 15 pour les moins de 50 ans et 18 mois pour les plus de 50 ans.

Cela exclurait entre 180 000 et 300 000 personnes de l'indemnisation du chômage.

 

            E-Les retraités maltraitées :

 

La réforme des régimes spéciaux a allongé la durée de cotisation à 40 ans pour obtenir une retraite à taux plein en 2012 avant de subir un prochain alignement. Pour tous les autres la durée de leurs cotisations est passée de 40 à 41 ans d'ici 2012 pour une retraite à taux plein, sachant que les conditions de départ à la retraite seront de nouveau aggravées à ce moment là.

La loi de financement de la sécurité sociale libéralise le cumul emploi-retraite pour les assurés ayant une carrière complète, reporte à 70 ans l'âge des mises à la retraite d'office et améliore la surcote à 5% par an.

Les avantages familiaux représentent 25 % des dépenses de retraite. Dans le public, les pensions de réversion sont menacées, sous conditions de ressources. La femme étant l'égale de l'homme, les avantages familiaux sont également dans la ligne de mire : les 10% de bonification à partir du troisième enfant seraient remplacés par une somme forfaitaire et , dans le privé, les deux années de bonification par enfant, pour les femmes, seraient ramenées à une seule.

Une autre difficulté est en vue : la prise en charge de la dépendance garantie par une caisse autonome, dite du cinquième risque, dont le financement serait supportée par les retraités.

Enfin, au mépris de la loi Fillon de 2003, la revalorisation des retraites indexées sur le coût de la vie est scandaleusement sous-estimée, effectuée en retard alors qu'un million de retraités vivent avec moins de 817 € par mois, le seuil de pauvreté. Cette année, une revalorisation de 1% a été effectuée le 1er avril au lieu du 1er janvier comme la loi l'exige.

 

            F-La politique du logement :

 

La multiplication des travailleurs pauvres pose le problème du logement de façon encore plus aiguë dans la période de spéculation immobilière que nous avons connu récemment. De fait, 100.000 personnes se trouvent sans domiciles fixe, 600.000 sont logées chez des tiers et 2.300.000 se trouvent logées dans des conditions difficiles.

Les mesures prises sont essentiellement démagogiques dont le seul effet est celui d'annonce. Le rapport d'Emmaüs sur l'habitat indigne ne laisse aucune place au doute. Le recentrage du parc HLM sur sa vocation sociale passe par la baisse de 10% des plafonds des ressources, mais l'obligation à quitter les lieux si les ressources dépassent plus de deux fois le plafond deux ans d'affilée est assortie d'un délai qui passe de trois ans à six ans pour partir. L'obligation dans les communes d'avoir 20% de logements sociaux est reportée aux calendes grecques. Pendant le même temps, le recours aux crédits hypothécaires est simplifié (!) et l'accession à la propriété au sein des HLM encouragée.

Les promesses de construire des maisons à 15 € par jour et 120.000 logements HLM n'ont aucune réalité concrète et la généralisation de la distribution du Livret A a pour unique intérêt la concession d'un avantage important aux banques.

La loi DALO (Droit Au Logement Opposable), est loin de changer quoi que ce soit du fait de ses imprécisions et la lourdeur des procédures qu'elle implique.

Si le dépôt de garantie du locataire a été réduit, le délai accordé pour l'exécution d'une expulsion est ramené de trois ans à un an.

 

 

3   Une politique sécuritaire liberticide

 

Le succès électoral de Sarkozy tient essentiellement à la captation des voix de l'extrême droite. En promouvant des lois augmentant les peines, en réduisant la liberté d'expression et la liberté de grève, en criminalisant l'action sociale et politique et en organisant la chasse aux immigrés clandestins, boucs émissaires tout désignés, il tente de s'assurer le soutien de la partie de la population la plus réactionnaire et xénophobe.

 

Toute une série de lois (sécurité intérieure, prévention de la délinquance) se succèdent :

- la loi « anti-récidive » d'août 2007 requière des peines minimales d'emprisonnement pour les récidivistes de plus de seize ans. Pour toutes les infractions violentes, « l'excuse de minorité » est écarté ;

- la loi relative à l'irresponsabilité pénale et à la rétention de sûreté prévoit l'enferment dans un centre socio-médico-judiciaire des condamnés ayant fini leur peine et estimés dangereux par une commission pluridisciplinaire ;

- pour que les victimes soient reconnues et pour mettre fin aux décisions de non-lieu, la loi prévoit qu'en cas d'abolition du discernement d'une personne mise en examen, la chambre d'instruction rende, en audience publique, un arrêt de déclaration d'irresponsabilité pénale pour trouble mental.

 

En remettant en cause l'ordonnance de 1945 sur la protection de la jeunesse, en créant des centres fermés pour les mineurs et en autorisant l'emprisonnement à partir de treize ans, c'est bien la répression qui prévaut sur l'éducation. Le rapport Varinard préconise même l'emprisonnement à partir de 12 ans en matière criminelle et la création d'un tribunal correctionnel pour les 16-18 ans. Cela va de paire avec la diminution de 40 % des crédits alloués à la protection de l'enfance.

L'annonce faite de la possible suppression du juge d'instruction, qui instruit en principe à charge et à décharge, modifie profondément le droit français en le calquant sur le droit anglo-saxon , plus profondément inégalitaire, pour le plus grand bonheur des officines de détectives privés qui applaudissent.

La multiplication des fichiers (base-élève, Edvige), le relevé systématique des empreintes génétiques, la généralisation de la vidéo surveillance posent un réel problème de liberté publique.

Quand on voit la fusion de la Direction de la Surveillance du Territoire avec la Direction Centrale des Renseignements Généraux dans la Direction Centrale du Renseignement Intérieur (DCRI) afin de regrouper tous les renseignements et fichiers, « 1984 » n'est plus très éloigné. Sans compter le projet, dans le plan militaire, de protéger les lieux abritant un « secret défense » comme Dassault, Areva, EADS où les juges n'auraient plus accès.

Une justice de plus en plus soumise au pouvoir politique avec de moins en moins de moyens et donc pratiquant de plus en plus une justice d'abattage.

 

Ces deux dernières années ont connu des inculpations répétées de militants associatifs, syndicaux dont le seul tort était de lutter pour des revendications sociales ou de mener des actions de solidarité avec des mal-logés ou des sans-papiers.

Ainsi, la Loi de Finance 2009 donne comme objectif chiffré, pour 2010 : 28.000 reconduites à la frontière et 5.500 interpellations « d’aidants ».

Les sans-papiers sont donc particulièrement victimes de cet acharnement policier et judiciaire. La création du ministère de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du co-développement et le transfère de la tutelle de l'OFPRA (Office Français de Protection des Réfugiés et Apatrides) à celui-ci ont des conséquences profondément injustes. Les demandes des réfugiés sont en baisse rapide car massivement refusées. Les conditions de leur défense de plus en plus difficiles. En 2008, sur 42.500 demandes d'asile, seulement 11.461 ont été accordées !

Le but est de limiter l'immigration familiale qui touche aussi bien les couples étrangers que les couples mixtes. Les étrangers de plus de seize ans ainsi que les conjoints étrangers de Français seront soumis à une évaluation de leur degré de connaissance de la langue française et des valeurs de la République, dans leur pays de résidence. Les conditions de ressources en fonction de la taille de la famille sont durcies, plafonnées à 1,33 SMIC.

Le recours à des tests ADN a été encadré.

Cette politique du chiffre est la conséquence d'une manipulation politique car la reconduite aux frontière, si elle est inhumaine pour ceux qui la subissent, n'est absolument pas rentable (21.000 € en moyenne par reconduction). Cette politique découle de l'idée d'une immigration choisie particulièrement néfaste aux pays pauvres et inconséquente pour la France.

 

La question de la dérive autoritaire est partout présente : la police se sent au-dessus des lois, multiplie les violences, les garde à vue ont doublé l'an passé, touchant 1% de la population (560.000), la surpopulation carcérale (63.000) provoque une vague de suicides (un tous les trois jours depuis le début de l'année) et le rapport de la commission du Dr Albrand traitant de cette question est détourné par la Chancellerie.

La refonte de la carte judiciaire s'est faite sans aucune concertation, les réformes de la santé, les réformes dans l'éducation et la recherche :  pareil. La main-mise du pouvoir sur l'audiovisuel public est scandaleuse, tout autant que les cadeaux faits à l'audiovisuel privé acquis au gouvernement. Les nominations, le fait du Prince. Les petits égarements, aussi bien au Mexique qu'au Fouquet's ou au salon de l'agriculture entre autres, sont significatifs d'une présidence qui se coule dans le moule d'une République bananière. Sarkozy n'a-t-il pas la banane ?.

 

La volonté de contrôle étatique de la société existe également vis à vis des mouvements sociaux :

- dans les transports terrestres un système d'alerte ouvrant des négociations est censé éviter le déclenchement d'une grève et un service minimum est instauré ;

- dans l'éducation, les mêmes dispositions sont en vigueur : l'obligation de négocier au préalable a pour conséquence de reporter la grève de 10 jours après le préavis et d'empêcher de la reconduire. Le service minium d'accueil décrété dans le premier degré se heurte aux difficultés des maires pour sa mise en pratique. L'acharnement à retirer une journée de salaire aux enseignants qui refusent de faire l'aide personnalisée (retrait de salaire de 500 à 900 € à la fin du mois) est significatif du durcissement des rapports sociaux.

 

 

4   Du Grenelle de l'environnement

 

La farce écologique du Grenelle de l'environnement, soluble dans la recherche du profit maximum, n'a laissé aucune illusion aux associations qui ont bien voulu s'y prêter : pas un mot sur le nucléaire ! Depuis, la mise en chantier d'un second réacteur EPR confirme l'orientation traditionnelle qui consiste à développer la demande énergétique de la population au-delà des besoins responsables.

 

Faut il rappeler qu'aucune loi qui a été votée à l'heure actuelle, mais seulement un Avant-projet de loi: Engagement national pour l'environnement qui a été présenté au Conseil des ministres du mercredi 7 janvier 2009. Pour bien comprendre les avancées environnementales et écologiques citons l'article 20 de cet avant-projet qui ….vise au développement d'un système de péage sans arrêt pour l'utilisation de certaines infrastructures (lire: autoroutes et pour les poids lourds). 

 

 

5   Des aides pour les plus riches

 

Pour la classe politique, le moteur de la société est l'entreprise ou, plus simplement, les riches (voir les discours de Sarkozy qui souhaite des riches plus riches pour le bien général). Rien d'étonnant dans ces conditions que ceux-ci soient l'objet de toute son attention même si, à l'occasion, des patrons sont montrés du doigt : Crise sociale oblige.

 

Les mesures fiscales sont importantes : allègement des droits de donation et de succession (abattements portés de 50.000 € à 150.000 € par enfants lors de dons ou d'héritages et à 76.000 € pour des donations entre époux ou pacsés, à 30.000 € pour des cadeaux aux petits enfants) ; pour les plus riches, un bouclier fiscal qui limite le montant cumulé des impôts payés à 50 % de leurs revenus globaux. Ainsi 834 contribuables ont reçu en moyenne un chèque de 368.000 € de l'État pour trop perçu. Pourtant, la fraude fiscal, les niches fiscales et l'expatriation de capitaux dans des paradis fiscaux représenté un manque à gagner de l'ordre de 10 %.

Les assujettis à l'Impôt de Solidarité sur la Fortune qui possèdent un patrimoine compris entre 770.000€ et 2.450.000 € ont acquitté en moyenne 1.100 €. Par ailleurs, 40 % des recettes de l'ISF proviennent de la première tranche et 40 % de la tranche la plus élevée (plus de 16.020.000 €) : les plus riches le sont vraiment. Voir le graphique représentant l'évolution des revenus entre 1998 et 2006.

L'exonération de cotisations sociales pour les heures supplémentaires (quatre milliards par an), si elle renforce le chômage, est tout bénéfice pour les entreprises. La suppression de la taxe professionnelle sera l'occasion de faire un nouveau cadeau de huit milliards d'euros à celles-ci après les quelques 33 milliards d'exonérations de cotisations patronales.

La future loi de Modernisation de l'Économie (LME) prévoit de nombreuses mesures pour encourager les entrepreneurs : simplifier le droit pénal des affaires, c'est-à-dire protéger les patrons, réduire les délais de paiement à 60 jours, simplifier le dépôt d'un brevet, etc.

A cela il faut ajouter les mesures présentes en faveur des banques et de la construction automobile qui mobilisent 360 milliards d'euros. A comparer au plan en direction des travailleurs : 2,6 milliards.

 

 

6   La politique étrangère en plein virages

 

La conception « occidentalo-atlantiste » de Sarkozy, en rupture avec les pratiques issues du gaullisme, détermine, non sans incohérences, les choix qu'il fait vis-à-vis de l'OTAN, du conflit israëlo-arabe, de l'Iran, de la Géorgie, de l'Afghanistan. Elle se conjugue avec une conception affairiste des rapports diplomatiques. Se confrontant à d'autres politiques d'État ses actions ont été souvent contrecarrées.

 

Les décisions de politique extérieure, traditionnellement « domaine réservé » du président, atteignent le champ du ridicule lorsque Sarkozy reçoit Kadhafi ou encore s'exercent à contre-temps  lorsqu'il augmente le contingent militaire en Afghanistan, en dépit des mises en garde des milieux du renseignement.

Le ralliement à l'OTAN découle de sa vision du monde dans le cadre du « choc des civilisations » qu'il prétend pourtant rejeter. Son engagement contre le terrorisme en Afghanistan en est l'illustration. Le changement de cap opéré par Obama désavoue cette attitude.

Sa déclaration très dure vis-à-vis de l'Iran en 2007 : « la bombe iranienne ou le bombardement de l'Iran » a été mal reçue ,non seulement en Iran, mais même aux USA. Sa tentative de pousser l'Europe sur ces positions n'a pas réussi.

A propos du Liban, en rupture avec la politique de Chirac, il invite tous les courants libanais (dont le Hezbollah) sans pouvoir régler la question de la présidence libanaise. Ce que fera le Qatar. A contrario, il invite Bachar Al-Assad au 14 juillet à côté du premier ministre israélien.

De même, sa visite en Israël est l'occasion pour lui de reprendre la mythologie biblique à son compte, à exprimer sa sympathie pour les souffrances des Israéliens, à condamner le Hamas et ne pas dire un mot de l'occupation, des souffrances des Palestiniens et de la colonisation.

Il en est résulté un grand désarroi autour du sommet méditerranéen sur la participation de Mme Tzipi Livni et de certains pays arabes. L'Union Pour la Méditerranée, qui représente une de ses ambitions, demeure un vœux pieux par rapport au processus de Barcelone qui avait permis des investissement au sud, liés hélas à des privatisations. Il n'y aura pas, en l'état,de convergence dans les niveaux de vie entre la côte sud et la côte nord, d'autant que les accords contre l'immigration suppriment les revenus issus des travailleurs expatriés. Aucun accord politique important est envisageable en l'absence de règlement du conflit Israélo-palestinien.

Par rapport à l'Afrique, après le période Jean-Marie Bockel qui croyait à la pensée présidentielle soit-disant opposée à la Françafrique, tout est rentré dans l'ordre pour que les affaires continuent comme avant. Sarkozy durant son voyage, fin mars, s'est fait le commis voyageur de Total, Vinci, Alstom, Lafarge, Bolloré et Areva.

Sa présidence de l'Europe, marquée par le conflit géorgien, si elle lui a permis d'accroitre son activité médiatique, n'a pas eu de résultat tangible sauf sur la question des sans-papiers. La directive de la honte est véritablement son chef-d'œuvre : 18 mois de mise en rétention, interdiction de 5 ans pour un retour sur le territoire.

Enfin, sa position maladroite et ambiguë sur le Tibet, qui a ulcéré durablement le gouvernement chinois, est un échec personnel.

 

 

7   Deux réformes constitutionnelles

 

Le Parlement a été réuni en Congrès deux fois. La première fois pour lui donner les moyens de ratifier le traité de Lisbonne, la deuxième fois, principalement, pour complaire aux désirs de modifications du président.

 

Afin de ratifier le traité de Lisbonne en toute tranquillité, le Parlement a modifié la Constitution en 2007. Il s'est prononcé en 2008 sur de nouvelles modifications permettant au président de la République de s'exprimer devant le Parlement réuni en Congrès, limitant la durée de la présidence de la République à deux mandats consécutifs, instituant un référendum demandé sur les questions sociales et environnementales par un cinquième des membres du Parlement, soutenu par un dixième des électeurs inscrits. L'article 11 spécifie : « Les orientations pluriannuelles des finances publiques sont définies par des lois de programmation. Elles s'inscrivent dans l'objectif d'équilibre des comptes des administrations publiques. » Le gouvernement se doit d'informer le Parlement de sa décision de faire intervenir les forces armées à l'étranger ; après quatre mois d'intervention, le gouvernement soumet sa prolongation à l'autorisation du Parlement. Le Conseil supérieur de la magistrature se voit soumis à une plus forte dépendance vis-à-vis du pouvoir exécutif.

 

 

8   Un pays en lutte

 

La volonté non dissimulée de criminaliser les luttes, le recours systématique à la force dans un contexte économique caractérisé par un sauve-qui-peut général où le champ politique est déserté par l'opposition présentent des risques importants de dérapages violents. Les syndicats jouent les pompiers dans un course de lenteur avec le pouvoir, dans une situation où les travailleurs sont prêts à réclamer leur dû.

 

Cinquante mille chômeurs de plus par mois fin 2008, 90.000 par mois début 2009, ce sera un million de chômeurs en plus à la fin de l'année, soit 50 % de plus qu'il y a un an. Pour ceux qui sont comptabilisés !

La détresse sociale, après une perte continue de pouvoir d'achat et de fragilisation des couvertures sociales, s'exprime massivement contre l'injustice qui règne dans le système capitaliste. Pourtant, la politique économique néolibérale du pouvoir continue d'avancer imperturbablement, généreuse pour les riches et pingre avec les pauvres.

Aujourd'hui se trouvent face à face les travailleurs de Arcelor Mittal, de Continental, de 3M, de Sony, de Caterpilar, FCI Microconnections, de Conforama, de la FNAC, de l'automobile, etc. et leurs patrons, parfois dans un bras de fer (grèves, occupations, séquestrations). Pendant ce temps, les dirigeants se gavent de stock-options, de parachutes dorés, de bonus et de retraites-chapeaux. Au-delà des fraudes fiscales individuelles, les grosses entreprises comme Michelin, Elf et Adidas sont compromises dans des exportations frauduleuses de capitaux.

Le pouvoir n'a pour réponse qu'un décret écran de fumée qui vise seulement les stock-options de huit entreprises aidées par l'État, sans toucher aux retraites-chapeaux (Daniel Bouton -Société Générale- : une retraite de 730.000 € par an), aux bonus et aux parachutes dorés.

Depuis un an, c'est l'ensemble des groupes sociaux qui sont entrés en résistance : les professionnels du droit, les enseignants, les chercheurs, les lycéens et étudiants, les parents d'élèves, les travailleurs des entreprises qui délocalisent ou qui ferment, les travailleurs sociaux, les cheminots, l'audiovisuel public, les retraités, même les taxis ou les notaires ! Les manifestations du 29 janvier et du 19 mars ont été des succès de mobilisation, ces journées ainsi que les mouvements qui se propagent bénéficient d'un soutien massif de la population.

Des formes nouvelles de luttes apparaissent comme le mouvement des « désobéisseurs » à la suite des autres mouvements de désobéissance civile ; d'autres luttes renouent avec les traditions de l'action directe prônée en 1908 par Emile Pouget telles que l'occupation et la séquestration des cadres.

L'exemple irremplaçable de la grève illimitée en Guadeloupe est à reprendre, à perfectionner. Leur sentiment qu'une situation de même type sur le continent aurait donné des résultats bien plus rapides  est en soi un encouragement.

 

 

 

Nous nous trouvons au milieu d'un quinquennat qui montre sa force de transformation de la société dans le sens d'une plus grande injustice sociale et d'une plus forte précarité pour les plus faibles de plus en plus nombreux. En même temps, il incarne une politique qui a fait faillite de façon retentissante, peut-être fatale au capitalisme. Les contorsions employées par le chef de l'État ne trompent personne et, si les hommes du pouvoir réel, c'est-à-dire du pouvoir économique, font profil bas, tout se met en place pour juguler une révolte générale et maintenir les rapports sociaux dans leur état antérieur.

 

Le débat est aujourd'hui ouvert, dans la situation de crise profonde que nous vivons, de trouver les solutions qui épargnent le maximum de vies humaines. Il s'agit de lutter contre la paupérisation d'une masse importante de la population, contre la perte irréparable de notre environnement, contre les tentations agressives qui se feront jour corrélativement à l'accroissement des difficultés.

Les solutions avancées par la gauche comme par la droite, en Europe et au niveau mondial, ne sont que des cache-misère payés par les sacrifices des travailleurs pour remettre le capitalisme en selle, purgé de ses groupes les moins solides. Au mieux, elles redonneront artificiellement et provisoirement un peu de pouvoir d'achat gravement amputé durant les trente dernières années aux travailleurs sur le dos des populations des pays émergents avec des conséquences environnementales toujours plus graves. Au pire, elles seront tentées de détruire une partie importante de la production par la multiplication des conflits armés.

L'effondrement de l'opposition sociale-libérale n'offre aucune porte de sortie honorable au gouvernement. Sa complaisance sans faille au néolibéralisme la disqualifie et les « trahisons » multiples de ses plus éminents éléments démontrent mieux qu'un discours sa vacuité mentale.

Les tentatives de recomposition politique à gauche en sont à leurs débuts dans une certaine confusion pour les travailleurs qui ont perdu leurs illusions électoralistes, qui ne militent pas encore pour une transformation de type révolutionnaire, mais qui luttent contre l'exploitation capitaliste et l'État bourgeois, qui aspirent à de nouvelles valeurs dans une société réellement démocratique, opposée au profit.

 

L'intérêt de la lutte du Lyannaj Kont Pwofitasyon à la Guadeloupe se porte sur la forme de son organisation, à savoir un collectif très large qui met en commun des revendications indissociables, et sur la nature de la lutte, à savoir la mise en avant de la mobilisation de masse et l'obstination. Très concrètement : la réalisation de la grève générale illimitée.

 

Le manifeste des neuf intellectuels antillais apporte un éclairage actualisé de ce qui peut motiver un tel mouvement. Extraits :

 

« [.] La force de ce mouvement est d'avoir su organiser sur une même base ce qui jusqu'alors s'était vu disjoint, voire isolé [.] La dynamique du Lyannaj [.] est d'allier et de rallier, de lier relier et relayer tout ce qui se trouvait désolidarisé [.] Cette grève est donc plus que légitime, et plus que bienfaisante [.] Ce système a confiné nos existences dans des individuations égoïstes qui vous suppriment tout horizon et vous condamnent à deux misères profondes : être "consommateur" ou bien être "producteur". Le consommateur ne travaillant que pour consommer ce que produit sa force de travail devenue marchandise [.] Ce mouvement se doit donc de fleurir en vision politique, laquelle devrait ouvrir à une force politique de renouvellement et de projection apte à nous faire accéder à la responsabilité de nous-mêmes par nous-mêmes et au pouvoir de nous-mêmes sur nous-mêmes. [.] Le déficit en responsabilité crée amertume, xénophobie, crainte de l'autre, confiance réduite en soi.[.]Et c'est dans la responsabilité que se trouve l'invention, la souplesse, la créativité, la nécessité de trouver des solutions endogènes praticables. C'est dans la responsabilité que l'échec ou l'impuissance devient un lieu d'expérience véritable et de maturation. [.] La haute nécessité est de tenter tout de suite de jeter les bases d'une société non économique, où l'idée de développement à croissance continuelle serait écartée au profit de celle d'épanouissement ; où emploi, salaire, consommation et production serait des lieux de création de soi et de parachèvement de l'humain. [.] Le capitalisme contemporain réduit la part salariale à mesure qu'il augmente sa production et ses profits. Le chômage est une conséquence directe de la diminution de son besoin de main d'œuvre. Quand il délocalise, ce n'est pas dans la recherche d'une main d'œuvre abondante, mais dans le souci d'un effondrement plus accéléré de la part salariale. Toute déflation salariale dégage des profits qui vont de suite au grand jeu welto de la finance. Réclamer une augmentation de salaire conséquente n'est donc en rien illégitime : c'est le début d'une équité qui doit se faire mondiale. [.] Le plein emploi ne sera pas du prosaïque productiviste, mais il s'envisagera dans ce qu'il peut créer en socialisation, en autoproduction, en temps libre, en temps mort, en ce qu'il pourra permettre de solidarités, de partages, de soutiens aux plus démantelés, de revitalisations écologiques de notre environnement... »

 

 


Entre 1998 et 2006 :

 

pour 0-90 cad 90 % les moins riches : + 4,4%, revenu moyen 18.500 €

pour 90-100 cad 10 % les plus riches : + 8,7 %, revenu moyen 79.260 €

pour 95-100 cad 5 % les plus riches : + 11,3 %, revenu moyen 104.364 €

pour 99-100 cad 1 % les plus riches : + 19,4 %, revenu moyen 201.423 €

pour 99,9-100 cad les 1 pour mille les plus riches : +32 %, revenu moyen 537.000 €

pour 99,99-100 cad les 1 pour 10 000 les plus riches : + 42 %, revenu moyen 1.499.654 €

    « L'action directe, manifestation de la force et de la volonté ouvrières, se matérialise, suivant les circonstances et le milieu, par des actes qui peuvent être anodins, comme aussi ils peuvent très violents. C'est une question de nécessité, simplement. »

Publié dans Points de vue

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